Aider les abeilles indigènes à se protéger d´un virus mortel et des abeilles européennes exotiques (2000)
Le secteur apicole du sud de l'Inde peut être protégé des attaques d'un virus qui a décimé les colonies d'abeilles locales grâce à des efforts conjugués de formation, de vulgarisation et de techniques apicoles mises au point en Asie, d'après un rapport de la FAO. Après avoir étudié la situation, Nicola Bradbear, expert apicole, a renoncé au projet d'introduire des abeilles européennes à haut rendement (Apis mellifera) dans l'Etat de Karnataka, dans le sud de l'Inde, dans le but de faire échec au virus thaïlandais du couvain sacciforme (TSBV). "Rien ne prouve qu'Apis mellifera résistera bien dans les conditions actuelles", a-t-elle déclaré.
L'Etat de Karnataka était naguère un important producteur de miel. Au cours des cinq dernières années, jusqu'à 90 pour cent des colonies d'abeilles indigènes Apis cerana de l'Etat ont été détruites. Les apiculteurs - qui tiraient auparavant un revenu décent, de l'ordre de plus de 2 000 dollars par an, de la production de miel - doivent aujourd'hui survivre en travaillant comme ouvriers agricoles ou travailleurs itinérants
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Karnataka: un agent du vulgarisation examine des abeilles locales
Les agents de vulgarisation qui cherchaient une solution à cette crise ont entendu dire que les abeilles européennes exotiques, qui résistent à ce virus, avaient été introduites avec succès dans le nord de l'Inde et donnaient des rendements élevés. Le docteur Bradbear a jugé que l'importation d'Apis mellifera dans l'Etat de Karnataka ne réglerait guère le problème. "Apis mellifera présentera des problèmes nouveaux pour les agents de vulgarisation et les apiculteurs en raison des maladies indigènes auxquelles elle sera susceptible et en raison des nouvelles maladies qu'elle risque d'introduire", a-t-elle indiqué. Elle a également mis en garde contre les risques pour l'environnement: "Les éléments d'information recueillis dans d'autres régions de l'Asie semblent indiquer que l'introduction à grande échelle d'Apis mellifera peut entraîner la disparition des espèces d'abeilles indigènes…Cette disparition d'espèces d'abeilles pourrait à son tour provoquer une diminution de la pollinisation des espèces végétales, ce qui entraînerait une perte de diversité encore plus importante."
Son rapport constate également que les abeilles européennes ne sont économiquement viables que lorsqu'elles sont élevées à grande échelle, ce qui ne correspond pas du tout à la situation des apiculteurs sans terre de Karnataka. L'expérience des apiculteurs locaux confirme les réserves exprimées par la consultante. Certains d'entre eux ont déjà essayé d'élever des colonies d'Apis mellifera pour constater qu'elles ne se développent pas bien et que, lorsqu'il pleut, elles ne quittent pas du tout leurs ruches.
Un Programme de coopération technique de la FAO a été mis en place pour contribuer au redressement de l'apiculture à Karnataka, qui représente une source de revenus pour les agriculteurs sans terre. Le programme comporte trois objectifs principaux:
apprendre aux agents de vulgarisation à gérer Apis cerana de façon efficace, notamment en leur montrant comment continuer d'élever cette espèce en présence du virus TSBV;
encourager les agents de vulgarisation à travailler avec les ramasseurs de miel sauvage, essentiellement des nomades, qui selon certaines estimations recueillent plus de 50 pour cent de la production de miel de l'Etat dans des colonies sauvages d'Apis dorsata;
aider les apiculteurs et les ramasseurs de miel sauvage à maximiser le potentiel de commercialisation du miel, de la cire d'abeille et du pollen récoltés.
Le programme profitera de l'expérience acquise au Vietnam dans la gestion du TSBV. Six agents de vulgarisation et apiculteurs indiens seront envoyés au Centre de recherche et de développement de l'apiculture à Hanoï pour y recevoir une formation. Les données d'expérience recueillies en Asie au cours des vingt dernières années montrent que, avec une gestion prudente, des colonies d'Apis cerana résistantes au TSBV commencent à apparaître dans les dix ans qui suivent le début de la maladie et il existe déjà des signes d'un rétablissement de la population d'Apis cerana à Karnataka.
16 mai 1997