Article d'E.D.A.P.I.

Plantes transgéniques et apiculture
Conférence de Madame Pham-Délègue au Congrès de Colmar (mars 1998)
Transcription par Nicole Pons

La conférence va traiter de la création de nouvelles variétés végétales à l'aide des techniques modernes que sont les transformations génétiques. Il s'agit de l'introduction dans le génome de plantes de gènes issus généralement d'autres plantes, dans le but de leur donner de nouvelles propriétés intéressantes pour les producteurs.

Aujourd'hui il va être question du colza transformé génétiquement pour lui donner des protéines insecticides.

On peut évidemment s'inquiéter de la présence de ces protéines insecticides dans des plantes visitées par des insectes comme les abeilles. C'est la raison pour laquelle le travail présenté porte sur les effets à court terme qui peuvent tuer ou affecter l'abeille immédiatement et également sur les essais à long terme.

Pourquoi modifier génétiquement un colza ?
Si l'homme a été conduit à introduire dans le génome du colza des gènes pour lui faire fabriquer des protéines insecticides, c'est parce que les produits chimiques utilisés pour lutter contre les coléoptères qui ravagent le colza ont des conséquences non négligeables sur l'environnement. Dans ces conditions, il était intéressant de rechercher des méthodes alternatives de lutte à l'image de celles qui sont utilisées pour protéger le maïs contre les lépidoptères.

Pour permettre au maïs de lutter contre les lépidoptères qui le ravagent, les chercheurs ont introduit dans son génome des gènes issus de Bacillus thuringiensis. Ainsi modifié, il fabrique une toxine qui détruit les lépidoptères en agissant sur leur système nerveux. Actuellement plusieurs espèces de maïs ainsi modifiées (Novartis, Monsanto) ont eu l'autorisation d'être mises sur le marché.

Comme les toxines de Bacillus thuringiensis ne sont pas efficaces sur les coléoptères du colza, il fallait trouver un autre type de gènes. Les chercheurs ont pensé à introduire des gènes qui fabriquent des inhibiteurs des protéases pour bloquer le système digestif des coléoptères. Le problème est que le tube digestif des abeilles pourrait être sensible à ces mêmes inhibiteurs de protéases.

Quelle démarche utiliser pour contrôler les effets du colza modifié sur le tube digestif des abeilles ?
Rappelons que les inhibiteurs de protéases sont des protéines fabriquées par des plantes génétiquement modifiées mais que l'on peut aussi se procurer à l'état purifié. Dans ce rapport, elles seront appelées protéines IP.

Pour contrôler les éventuels effets de ces protéines IP sur le tube digestif de l'abeille, l'INRA a réalisé des essais portant sur la relation qui peut exister entre ces protéines et différents niveaux de la physiologie de l'abeille. Plus précisément, ces protéines IP provenaient d'extraits de plantes modifiées (feuilles et tiges) ou bien étaient des protéines purifiées. Le comportement de butinage, la capacité d'apprentissage et la durée de vie ont été étudiés.

Influence sur le comportement de butinage
Rappels sur le comportement de butinage
Certaines butineuses :

  • cherchent de nouvelles sources de nourriture,
  • trouvent la fleur qui leur convient,
  • prélèvent du nectar et/ou du pollen,
  • apprennent à localiser la fleur par l'odeur, la couleur, la distance,
  • reviennent à la colonie,
  • donnent l'information par des danses et des transferts d'odeur,
  • recrutent de nouvelles butineuses qui vont sur la fleur indiquée.

Connaissance chimique du nectar et du pollen du colza transgénique
Les abeilles sont en contact avec les protéines IP fabriquées par la plante aussi bien sur la fleur butinée que par les réserves de la colonie.

La recherche faite pour la création du colza transgénique n'a porté que sur la relation entre le coléoptère et les parties de la plante qu'il consomme et nullement sur la relation entre la fleur de colza et l'abeille. Pour aborder ce sujet, il a fallu connaître la quantité et la qualité des nectars et pollens produits vis-à-vis de cette protéine.

Des prélèvements de nectar ont été effectués avec des micropipettes et des prélèvements de pollen ont été faits soit en prélevant des anthères fermés soit en les brossant. Les analyses chimiques n'ont permis de mettre en évidence la protéine IP ni dans le nectar ni dans le pollen des colzas transgéniques.

Ces premiers résultats sont logiques en ce qui concerne le nectar puisqu'il est riche en sucres et pauvre en protéines. Pour le pollen, c'est plus étonnant puisqu'il est riche en protéines. En fait, on sait que le promoteur 355 utilisé pour l'introduction du nouveau gène dans la plante bloque l'expression du gène fabriquant la protéine IP dans le pollen. A priori, il n'y a donc pas de danger de retrouver la protéine IP dans le pollen.

Les premiers résultats étant rassurants, on pourrait dire tout va bien, on est dans le cas d'une plante qui a été transformée génétiquement, mais dont le gène ne produit pas la protéine IP dans les éléments qui intéressent l'abeille.

Pourtant les études ont été poursuivies pour deux raisons essentielles :

  1. Il y a lieu d'être prudent car si les recherches sont restées négatives, c'est peut-être parce que les techniques d'analyses ne sont pas assez sensibles pour détecter des traces, ce qui n'empêche pas d'imaginer que les abeilles peuvent être sensibles à ces traces.
  2. Il faut poursuivre ces études méthodologiques modernes, car il ne s'agit pas d'évaluer uniquement ce type de plantes mais éventuellement, dans le futur, d'autres plantes mellifères qui auraient ce type de gènes.

Étude expérimentale
La deuxième étape a consisté à comparer le comportement de butinage des abeilles en présence de plantes transformées et en présence de plantes non transformées pour voir si ce comportement est perturbé.

Les études ont été conduites en conditions confinées avec une sécurité importante conformément aux autorisations d'expérimentation données par la commission qui statue sur les dossiers.

Les abeilles avaient la possibilité de visiter des plantes transformées et des plantes témoins et le nombre de visites d'abeilles a été recensé.

Sur le plan expérimental, il y a une cage de vol de 12 m3 et à l'intérieur :

  • une petite colonie,
  • un couple colza témoin - colza transformé pour la protéine IP ou un autre couple.

Les résultats montrent que, dans les deux cas, même s'il y a quelques variations dans les visites, quand on compare la répartition des abeilles sur les deux types de plante, il n'y a pas de différence significative.

Conclusions sur la relation, à court terme, entre le colza modifié et l'abeille
Dans les conditions de l'expérience, l'abeille ne fait pas de différence, elle va visiter aussi bien un type de plante que l'autre.

C'est rassurant et on peut penser que, lorsque l'abeille butineuse devra visiter des plantes modifiées et des plantes non modifiées, elle ne fera pas de différence.

Influence sur le comportement d'apprentissage
Après avoir étudié la relation à court terme, il est intéressant de voir ce qui se passe sur le long terme. Les capacités d'apprentissage d'odeur ont été étudiées en détail parce qu'elles sont intimement liées avec la manière dont l'abeille va butiner.

Des abeilles ont été élevées en petites cages ; on les a nourries pendant une quinzaine de jours avec différents régimes alimentaires :

  • soit une solution témoin de sucre,
  • soit une solution de sucre à laquelle on a ajouté la protéine IP,
  • soit une solution de sucre à laquelle on a ajouté une protéine neutre qui n'a pas d'effet négatif sur l'abeille.

Ces différentes solutions ont été testées à trois concentrations en protéines, des concentrations voisines de celles qui peuvent être rencontrées dans les feuilles des plantes transgéniques et des concentrations 10 fois et 100 fois plus élevées de façon à établir un seuil.

Le test utilisé est l'extension conditionnée de la langue. Cet essai biologique repose sur une réponse naturelle de l'abeille. L'abeille tire la langue d'une manière réflexe quand elle est en présence de nourriture et elle est capable d'apprendre très vite à tirer la langue quand elle est en présence d'une odeur qui remplace la nourriture.

Présentation du comportement d'apprentissage
Quand l'abeille arrive sur la fleur, elle est à la recherche de nourriture. Elle se déplace sur la fleur jusqu'à ce qu'elle trouve les nectaires qui produisent le nectar et dès qu'elle rentre en contact avec le nectar, elle a faim, elle tire la langue d'une manière réflexe et va prélever de la nourriture.

Ce réflexe peut devenir conditionné de la manière suivante :

  • Si on déclenche le réflexe en touchant les antennes ou la langue ou les tarses de l'abeille avec une solution de sucre, elle tire la langue.
  • Si on fait la même chose, c'est-à-dire qu'on déclenche l'extension de la langue et qu'en même temps on lui envoie une odeur et qu'on lui donne à manger à ce moment-là, elle associe la présence d'une odeur à une nourriture agréable, elle mémorise l'association odeur - nourriture et elle tire la langue.
  • Ensuite il suffit de lui présenter l'odeur pour qu'elle tire la langue.

L'abeille a des capacités d'apprentissage très développées. Il suffit de lui présenter l'odeur associée à la nourriture une seule fois pendant 6 secondes pour qu'elle sache que l'odeur est associée à la nourriture. Ensuite, dès qu'on lui envoie l'odeur seule, elle tire la langue. Elle conserve la mémoire de ce réflexe conditionné pendant quelque temps puis, étant donné qu'elle n'est plus récompensée par de la nourriture quand elle tire la langue, elle finit par cesser de répondre.

Étude expérimentale
Pendant les trois phases, acquisition du réflexe, maintien puis perte du réflexe, on compte le nombre d'abeilles qui tirent la langue et on construit la courbe du nombre de réponses positives en fonction du temps.

Les trois courbes permettent de comparer les réponses de l'abeille quand elle a été nourrie pendant 15 jours avant le test avec une solution sucrée normale ou une solution sucrée contenant la protéine témoin, ou encore une solution sucrée contenant la protéine IP à la concentration égale à celle qu'on trouve dans le colza transgénique.

Il n'y a pas de différence entre les trois courbes. Il semble que la protéine, à cette concentration-là, ne perturbe pas l'abeille dans son aptitude à reconnaître les odeurs.

Avec une concentration de la protéine IP,10 fois supérieure à celle qu'on trouve dans la plante, la différence ne concerne pas la comparaison entre le témoin et la protéine IP qu'on teste.

Enfin, avec une concentration de la protéine IP 10 à 100 fois supérieure à celle qu'on trouve dans la plante, il commence à y avoir un effet. Il y a une baisse des performances des abeilles qui ont été nourries pendant 15 jours avec la protéine IP à la concentration la plus élevée.

Conclusion sur la relation entre le colza modifié et le comportement d'apprentissage
Si on nourrit de façon prolongée les abeilles avec la protéine IP à la concentration exprimée dans la plante, il n'y a pas de modification du comportement d'apprentissage. Par contre si on la nourrit avec une concentration de 10 à 100 fois plus élevée, on peut s'attendre à des perturbations de la capacité d'apprentissage.

Influence sur la durée de vie des abeilles
Une vingtaine d'abeilles sont conservées en cagettes à l'étuve. Dans ces conditions, elles peuvent vivre jusqu'à deux mois, voire deux mois et demi.

Pour l'expérimentation, les lots d'abeilles sont nourris avec :

  • soit une solution témoin de sucre ;
  • soit une solution de sucre à laquelle on a ajouté la protéine IP à la concentration exprimée par la plante ou à des concentrations plus élevées ;
  • soit une solution de sucre à laquelle on a ajouté une protéine neutre à différentes concentrations.

On étudie la mortalité quotidienne qui montre l'évolution au cours des jours de la proportion cumulée d'abeilles mortes.

Lorsque toutes les abeilles sont mortes, la proportion est de 100 %.

Au début quelques abeilles meurent les premiers jours, puis la proportion augmente jusqu'à ce que toutes soient mortes au bout du deuxième mois.

Quand on est dans le cas de la protéine IP et de la protéine neutre à une concentration identique à celle qu'on trouve dans la plante, les trois courbes sont pratiquement superposées ; il n'y a pas d'influence de la protéine sur la durée de vie des abeilles.

Quand on est dans le cas d'une concentration de la protéine 10 fois supérieure, il commence à y avoir un effet. Mais la différence ne concerne pas la protéine IP. C'est la protéine neutre qui a un effet favorable à la survie de l'abeille.

Quand on est à la concentration la plus forte, 100 fois supérieure, il y a un raccourcissement de la durée de vie des abeilles. La différence est significative ; les abeilles qui ont consommé la protéine IP vivent une quinzaine de jours de moins que celles du groupe témoin.

Conclusion sur la relation entre le colza modifié et la durée de vie de l'abeille
Le nourrissement des abeilles avec la protéine IP aux concentrations voisines de celles trouvées dans la plante, n'a pas d'effet sur la durée de vie des abeilles.

Le nourrissement à une concentration 10 à 100 fois plus élevée a un effet sur la mortalité qui survient plus tôt que normalement.

Conclusions générales
Pour le colza transgénique étudié et seulement pour cette plante modifiée :

  • les inhibiteurs de protéases à vocation insecticide, à la concentration exprimée dans la plante, n'ont d'effet ni sur le comportement de butinage de l'abeille, ni sur sa capacité d'apprentissage des odeurs ni sur sa durée de vie ;
  • on peut établir des doses critiques qui sont de 10 à 100 fois supérieure à la concentration exprimée dans la plante pour lesquelles l'abeille est perturbée dans sa capacité d'apprentissage des odeurs et voit sa durée de vie diminuée ;
  • le nectar et le pollen ne contenant pas ces inhibiteurs de protéases, on peut être rassuré pour ce colza.

La méthodologie utilisée ici pourra servir de modèle pour étudier d'autres plantes transgéniques.

Le programme fait partie d'un programme européen qui a pour but d'étudier l'effet des plantes transgéniques sur les insectes auxiliaires, l'abeille, le bourdon et des insectes parasites qui protègent naturellement les plantes.

La conférence de Madame Pham-Délègue a suscité différentes questions.

Tous les colzas transgéniques ont-ils été analysés ?
Il faut être prudent pour porter un jugement sur la transgénèse. Les plantes transgéniques sont des plantes qui, par le transfert d'un gène particulier, vont acquérir une propriété particulière. Ceci a l'avantage d'être très ciblé et va permettre de faire le contrôle de l'effet de cette protéine. Ceci a un inconvénient pour chaque type de plante, pour chaque type de gène. Les évaluations nécessaires vont être différentes.

Ici l'évaluation portait sur un colza insecticide. Il y a des colzas résistants aux herbicides qui posent beaucoup d'interrogations. Des traitements peuvent détruire la flore adventice sans détruire le colza. On s'interroge sur la possibilité de voir ces colzas se croiser avec des familles apparentées dont les espèces indésirables deviendraient résistantes aux herbicides à chaque type de plante il y a un type de risque. Pour le colza résistant aux herbicides, il sera plus intéressant de voir comment il se croise avec d'autres types de plantes plutôt que d'étudier quelles relations il a avec les abeilles.

En ce qui concerne le maïs transgénique, on ne s'est pas intéressé à l'abeille qui n'était pas censée aller visiter le maïs. Maintenant on sait que le pollen de maïs est récolté par l'abeille. C'est un problème qui va devoir être pris en compte. Il faut étudier au cas par cas.

L'abeille va concentrer les protéines IP. Est-ce que des calculs ont été faits à ce sujet ?
C'est un fait qui a été pris en compte. D'une part on a expérimenté avec des concentrations jusqu'à 100 fois supérieures à celle de la protéine IP exprimée par la plante. D'autre part on a nourri les abeilles pendant deux mois et demi avec la protéine IP à des concentrations faibles. On a analysé au cours du temps l'augmentation de sa concentration dans le miel, les larves et les abeilles à l'intérieur de la colonie. On va voir à partir de quel délai on aura une augmentation de la concentration et à quel niveau on va arriver. En particulier, il est important de savoir si la concentration seuil va être atteinte.

Aucune recherche n'a été effectuée dans les cires. C'est un sujet qui devra être abordé.

Où en est la réglementation ? Y a-t-il un cadre juridique pour gérer les plantes transgéniques comme il y a des règles pour les produits sanitaires ?
En France, actuellement il n'y a pas de textes. Des commissions de spécialistes ont un rôle consultatif et les décisions sont prises au plan politique.

Pour le maïs Monsanto, la commission a donné un avis favorable à la mise au champ. Dans un premier temps, le Président de la République Française a refusé de suivre la commission. Puis l'Europe a autorisé la culture et le Président français est revenu sur sa décision pour permettre la mise en culture.

La Communauté Européenne a ses règles et chaque pays se positionne au cas par cas dans les limites fixées par la CE.

D'autres pays peuvent avoir d'autres règles. Les États-Unis ont accepté la mise sur le marché des colzas transgéniques. En Europe, c'est refusé jusqu'ici.

La protéine IP a-t-elle un effet sur le coléoptère ravageur du colza ?
Pas trop ! Les insectes ont su contourner les effets de la protéine IP par une autre voie métabolique, ce qui n'était pas prévu.

Actuellement des stratégies consistent soit à faire co-exprimer plusieurs protéines pour tendre à bloquer toutes les voies métaboliques, soit à utiliser des protéines ayant une action plus spécifique.

Que penser des métabolites de dégradation de la protéine IP ?
Pour cette protéine-là, il n'y a pas trop de problèmes : elle est rapidement dégradée. La méthode de fabrication des huiles la dégrade de telle sorte qu'il y a peu de risques de la retrouver dans l'alimentation humaine.

Au niveau de la dégradation du pollen par les abeilles, on ne sait pas. Des études sont encore à faire sur ce sujet.

Quels sont les essais qui ont été faits sur les abeilles dans les autres pays du monde ?
Il y a actuellement 80 variétés de plantes transgéniques. Aux États-Unis, il n'y a pas eu d'études systématiques sur les abeilles. Les cultures de plantes transgéniques (coton, tomate, cultures maraîchères) sont installées sans études sur abeille. En Angleterre, France, Hollande, Nouvelle-Zélande, les études débutent.

Peut-on faire confiance aux firmes ?
Les contacts sont bons. Avant les pouvoirs publics, ce sont les firmes qui ont été demanderesses d'informations parce qu'elles ont besoin de garantir les plantes qu'elles mettent sur le marché. Tant que les résultats sont bons, ça va ; dans le cas contraire, il faudra voir.

On a des raisons d'êtres inquiets. D'abord on parlait d'un seul gène, puis maintenant on s'aperçoit qu'il en faut davantage. Par ailleurs, on pensait que les abeilles n'allaient pas chercher du pollen sur le maïs. Maintenant on voit qu'elles y vont.

En ce qui concerne le maïs et la protéine BT, des études laissent penser qu¹il n¹y aurait pas d¹effets sur l¹abeille. Les constatations sont indirectes. La toxine BT est d¹ailleurs utilisée pour lutter contre la teigne des abeilles avec toutes les homologations nécessaires. Sil est certain que la sensibilité générale est à la protection de l¹environnement, la législation est en retard, très en retard, pour les produits systémiques, pour les plantes transgéniques.

L¹INRA a des travaux en cours avec l¹ACTA au sujet de produits phytosanitaires à utiliser sur les fleurs. Le but est d¹évaluer les effets sublétaux alors qu¹avant on évaluait la mortalité. En dessous de la DL50, on peut avoir des actions perturbatrices pour l¹abeille. La prise en compte de ce type d¹effets par les pouvoirs publics est en train de se faire. C¹est vrai pour les traitements classiques. C¹est aussi vrai pour les produits systémiques dont on connaît moins bien la cinétique au cours du développement de la plante.

Quels sont les effets sur la santé humaine ?
Il faut répondre au cas par cas. Par exemple pour un maïs, afin de suivre l¹efficacité de la transgénèse, à côté du gène de résistance aux herbicides, on lui a mis un gène de production d¹un antibiotique. On ne sait pas si cette production d¹antibiotique ne va pas être néfaste pour la santé publique.

Un autre point qui pose également des questions est celui des allergies. Le transfert de certains gènes qui entraînent l¹expression de protéines allergènes.

Ne va-t-il pas rendre certains malades allergiques à de nouvelles plantes ?
La Commission du Génie Biomoléculaire a pris conscience de ces problèmes et les prend en compte dans l¹étude des dossiers qu¹elle traite. C¹est sa vocation.

Quels sont les effets sur la pollution des sols ?
Ceci est un problème, mais il n¹est pas spécifique aux plantes transgéniques.

Certains agriculteurs mettent en place des cahiers des charges qui prévoient l¹absence de plantes transgéniques dans l¹alimentation des animaux. Il y a peut-être là une solution à approfondir.

L¹opinion publique a évolué par suite des différents problèmes rencontrés. Tous les partenaires de la société sont concernés au-delà des seules considérations économiques. Il y a lieu d¹être optimiste. La prise de conscience de toute la société se fait et le partenariat doit être très large.

La transgénèse : n¹est-ce pas triste pour les abeilles ?
Depuis que l¹homme cultive des plantes, il n¹a eu de cesse de conduire la nature et actuellement on est loin de la nature à l¹origine. Ceci étant, la transgénèse permet de faire des transformations très rapidement et parfois si vite que les contrôles ne peuvent pas suivre. Le danger réside dans cette accélération des transformations qui ne peuvent plus être contrôlées. L¹opinion publique va dans le sens de la prudence et les travaux qui sont faits par les scientifiques vont dans le sens de la mesure des risques.
Conférence de Madame Pham-Délègue au Congrès de Colmar (mars 1998) Transcription par Nicole Pons