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Le magnifique pollen de la mauve alcée
L’imagerie dans l’analyse pollinique (2000)
Par Paul Schweitzer
Laboratoire d’analyses et d’écologie apicole
Les participants au dernier stage d’initiation à l’analyse pollinique qui s’est déroulé à METZ en juin dernier ont eu l’occasion de s’en rendre compte, la mélissopalynologie est une science qui repose complètement sur l’analyses d’images.
Les grains de pollen présents dans les miels et qui permettent de remonter à leur origine botanique ou géographique diffèrent par leurs formes, leurs dimensions, leurs ornementations.
Grâce à ces différentes caractéristiques, le mélissopalynologiste peut les identifier puis les comptabiliser. Le principe est simple. En pratique tout se complique. Si les principaux pollens présents dans les miels français se limitent à quelques dizaines, avec les pollens secondaires ce nombre atteint quelques centaines voire quelques milliers en prenant en compte ne serait-ce que les miels étrangers importés dans l’Union Européenne. L’expérience et la faculté de mémorisation de l’analyste sont les atouts essentiels de la précision de son travail. Cette dernière atteint cependant des limites quand il s’agit d’identifier des pollens rencontrés ponctuellement. Cela est d’autant plus vrai que, quelquefois, les différences entre des pollens appartenant à la même famille botanique peuvent être infimes. L’utilisation de l’acétolyse permet de mieux visualiser les détails, mais cette technique reste lourde et est difficilement utilisable en analyse de routine. Et, même dans ce cas, il n’est pas toujours possible de remonter à l’espèce et il faut quelquefois se contenter du genre.
L’identification des grains de pollen est une méthode comparative : les pollens du miel sont confrontés à ceux qui sont détenus dans la " pollenothèque " du laboratoire, pollen prélevé directement sur des fleurs, identifiées avec précision, montés entre lames et lamelles et constituant des références. Plus le laboratoire possède de références et plus précises et plus fiables seront ses analyses. On peut également utiliser des photographies parues dans des ouvrages spécialisés à condition que celles-ci soient de bonne qualité.
1 - Image initiale d’un miel
printanier à dominante colza
2. Le même miel traité
en fausses couleurs
l’Abeille Paradoxalement, l’importance des références détenues par le laboratoire ne simplifie pas nécessairement la tâche... Il ne suffit pas de les avoir, bien rangées dans des boîtes. Encore faut-il les retrouver facilement. L’expérimentateur peut passer beaucoup de temps face un pollen inconnu. Certes l’expérience permet souvent d’avoir une première idée de sa famille botanique (pas toujours) mais encore faut-il trouver le genre et si possible l’espèce... Travail fastidieux surtout quand on utilise l’objectif à immersion... Travail qui n’est pas toujours indispensable pour une recherche dans le cadre d’une appellation botanique, mais qui peut l’être s’il s’agit de répondre à une question sur une origine botanique. Les techniques d’imageries micro-scopiques et d’analyses d’images peuvent être d’un grand secours...
Dans le cadre de sa politique de recherche, le laboratoire d’analyses et d’écologie apicole du CETAM-LORRAINE est équipé d’un prototype de logiciel mis au point par la société QUANTIMAGE. Cela grâce à une aide à l’innovation de l’ANVAR - LORRAINE. Cet équipement est composé de :
- Un microscope trioculaire pouvant travailler en immersion avec ou sans contraste de phase et avec ou sans polarisation
- Une caméra CCD
- Un moniteur de contrôle
- Un micro ordinateur PC équipé d’un logiciel et d’une carte d’acquisition mis au point par la Société QUANTIMAGE
- Des logiciels annexes permettant le traitement des images
- D’une imprimante.
Les images microscopiques numérisées ont déjà permis un archivage de milliers de pollen de la flore française et, pour le moment, d’une grande partie de celle qui est rencontrée dans les miels d’importation... Le même travail sera également effectué avec du pollen acétolysé. Cette formidable banque de données permet de retrouver rapidement, grâce à une classification judicieuse, un pollen présent dans les miels. Le travail de l’analyste est ainsi grandement facilité : gain de temps, précision dans l’identification... Cela d’autant plus que le système permet également des mesures morphométriques précises (distance, surface...).
Grâce à ces mesures et à des mesures colorimétriques par densité optique, le prototype ouvre également des perspectives intéressantes pour la quantification automatique des grains de pollen. C’est un système complexe qui est encore en cours d’amélioration et de perfectionnement. Le problème est difficile à résoudre car la densité optique de certains pollens est relativement proche et leurs différences morphométriques faibles. Il s’agit d’éliminer les faux positifs et les faux négatifs. Cependant le système permet des paramétrages à l’infini (limités seulement par la définition de l’image et la mémoire de l’ordinateur) et toutes les combinaisons sont possibles (coloration, dimensions, surfaces, etc.). L’autre problème vient de la superposition de grains de pollen... Là, également, les solutions du système sont élégantes et les résultats sont encourageants...
Le système " repère " avec la même efficacité les éléments indicateurs de miellat comme les spores, les mycéliums, les asques, les algues. Il peut également comptabiliser les levures, les fibres végétales, les grains d’amidon...
3 - Les pollens de colza ont été trouvés et comptabilisés.
Les résultats sont repris par un tableur.
Enfin, il permet aux apiculteurs curieux, d’obtenir rapidement, une microphotographie des pollens présents dans leur miel... Les trois documents 1-2-3 représentent différentes étapes de la reconnaissance pollinique. Les résultats sont transférés sur un tableur de type " EXCEL®" où ils peuvent être exploités.
Paul Schweitzer
Laboratoire d’analyses et d’écologie apicole