Le pas à pas : nourrissement et mise en hivernage (2003)
Jean-Maurice Cantin
avec l'aimable autorisation de la revue
Abeilles et Fleurs
Introduction
En cette fin d’été, ne croyez pas que les abeilles soient au repos. Elles préparent l’hivernage. Pour argumenter mon propos, je vous livre ces deux phrases tirées du Traité de biologie de l’abeille : « La colonie surmonte les difficultés de l’hivernage en formant en automne une génération [d’abeilles] à longue vie, dotée de réserves corporelles, capable de durer un hiver et d’élever la première génération du printemps. » (A. Maurizio, Traité de biologie de l’abeille, tome 1, page 129). Ces réserves sont faites dans les corps adipeux. « Le bon développement des corps adipeux d’hiver est sous la dépendance direct du pollen. » (R. Chauvin, Traité de biologie de l’abeille, tome 1, page 373). Nos colonies, pour préparer l’hivernage, tirent les ressources que sont le nectar et le pollen de l’environnement des ruches. Cet environnement peut être momentanément pauvre en ressources du fait des herbicides (destruction des adventices) ou des aléas climatiques (sécheresse, pluie ininterrompue). C’est à l’apiculteur de compenser ces manques. Un nourrissement spéculatif de fin d’été permet d’obtenir une population importante d’hiver. Un nourrissement de complément d’automne assure de finir de constituer les provisions.
Le nourrissement spéculatif contient une forte proportion d’eau. Comme le nectar, il stimule la ponte. Il ne doit pas être stocké par les abeilles. Il est donc distribué en petite quantité et consommé dans les huit à douze heures. La matière sèche du nourrissement spéculatif peut être composée de sucres et de protéines. Le nourrissement de complément contient une moindre proportion d’eau. Comme le miel, il doit constituer les provisions et être stocké par les abeilles. Il est distribué en quantité importante de façon à obtenir les 15 à 18 kg de provisions d’hivernage. La matière sèche du nourrissement de complément est uniquement composée de sucres. Les compléments protéinés et vitaminés sont en vente chez les fournisseurs pour l’apiculture. Ils sont prêts à l’emploi ou se mélangent aux différents sirops. Les quantités, qualités et périodes des nourrissements sont laissées à l’appréciation de l’apiculteur. Celui-ci évaluera avec art les besoins de ses colonies en fonction de ses connaissances des ressources naturelles et du climat de sa région. De bonnes connaissances techniques sont très utiles, mais elles doivent être soutenues et complétées par l’observation et l’expérience ; c’est là que réside une bonne partie du plaisir de l’apiculture.

Etape 1
Le sirop dénommé 1/1 ou 50/50 est fabriqué dans la proportion de 1 kg de matière sèche pour 1 kg d’eau (1 litre). Vous le fabriquez en faisant dissoudre du sucre de canne ou de betterave (que vous trouvez au rayon épicerie) dans de l’eau ou bien en diluant un sirop 75/25 (que vous trouverez chez votre fournisseur apicole). A 1 kg de sirop 75/25 contenant 0,75 kg de sucres et 0,25 kg d’eau, vous ajoutez 0,5 kg d’eau (1/2 litre), vous obtenez un sirop composé de 0,75 kg de sucres et de 0,75 kg d’eau, soit une proportion de 1/1. La différence entre ces deux sirops est que celui fait avec du sucre de canne ou de betterave, le saccharose, doit être « digéré » par les abeilles, alors que celui fait avec le sirop de chez votre fournisseur apicole contient différents sucres dont certains sont « prédigérés ». Le sirop 1/1 est utilisé en nourrissement spéculatif. Il est distribué au seau, à l’arrosoir ou avec une citerne et une pompe.

Etape 2
Le sirop dénommé 2/1 ou 66/34 est fabriqué comme le sirop 1/1 mais avec des proportions différentes. Il est utilisé comme nourrissement de complément s’il ne contient que du sucre et de l’eau et est distribué en quantité importante, ou comme nourrissement spéculatif s’il contient des protéines et est distribué en petite quantité dans le nourrisseur.

Etape 3
Le sirop dénommé 3/1 ou 75/25 est fabriqué avec du sucre de canne ou de betterave et de l’eau soit acheté sous ces proportions chez les fournisseurs apicoles. Ils sont distribués comme les autres sirops, mais la grande viscosité de ces produits en rend la distribution moins facile, sauf si celle-ci est diminuée en augmentant la température du produit. Ils sont utilisés en nourrissement de complément et distribués en grande quantité.


Etape 4
Le candi dénommé 9/1 ou 90/10 contient 90 % de matière sèche. Il permet la survie en hiver quand le nourrissement de complément n’a pas pu être fait à temps. La matière sèche est composée de sucres ou d’un mélange sucres et miel. Il est fabriqué par les apiculteurs ou acheté chez les fournisseurs habituels. Suivant sa présentation, il peut être découpé au couteau ou à la spatule. Il est disposé directement sur le dessus des cadres en périodes froides, les abeilles y ont directement accès sans défaire la grappe. Le pain de candi est souvent enveloppé dans un emballage en plastique, celui-ci est utilisé pour le couvrir et éviter son dessèchement par temps froid et sec.
Candi, découpage au couteau et Candi disposé sur les cadres.
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A ne pas oublier !
Un traitement varroase et un nourrissement spéculatif protéiné se complètent en fin d’été. Réduire les entrées des ruches si vous nourrissez avec du saccharose ou avec du miel ; ils provoquent le pillage, surtout si certaines colonies ont peu de population pour se défendre.
Pose d’un réducteur d’entrée
A ne pas faire !
Poursuivre un nourrissement spéculatif trop tard en arrière-saison.