Avec l'aimable autorisation de la revue du SNA - Abonnez-vous à l'Abeille de France
Une année avec la ruche d'observation (2001)
B. Schneider
L'année 2000 a été très pauvre en essaims (13 % de l'année précédente), aussi la ruche d'observation, un cadre de corps et un de hausse (photo) n'a pu être remplie le 15 mai 2000, qu'avec un cadre pris dans le corps d'une ruche très active ; il incluait 500 abeilles sans reine, du beau couvain frais et d'abondantes provisions périphériques.
Il fut surmonté d'un cadre de hausse avec cire gaufrée. Tout de suite, on a observé la construction de trois cellules royales; deux sont très vite abandonnées et seule la troisième est terminée, mais n'éclorera pas. Devant l'échec de l'élevage d'une reine, on a mis le 3 juin un petit tube de "Beeboost" pour étudier la stabilisation des abeilles et voir si cela contrarie les pondeuses. L'effet est spectaculaire : la ruche se met immédiatement au ralenti.
On assiste simplement à la fin de l'éclosion du couvain. Le 6 juin, on atteint le maximum d'abeilles avec 1200 insectes. Rappelons que les comptages se font sur photos des deux faces. Comme le nombre d'abeilles est très réduit, comparé à celui d'une ruche standard (environ 3 %), ses variations peuvent être rapides et importantes. Cette sensibilité permet de faire un diagnostic rapide : par exemple un accroissement de 1,6 à 3,0 % par jour est le signe d'une bonne période de naissances, un ralentissement des naissances (fin d'automne par exemple) correspond à une perte de 1,0 à 1,2 % par jour, alors qu'une perte de 5 % indique une anomalie (déficit de pollen avec avortement du couvain).
Après l'éclosion des dernières cellules, les abeilles ne sont plus du tout actives, ne sortent pratiquement pas et on assiste à la consommation des réserves tandis que les effectifs diminuent jusqu'à atteindre 540 abeilles le 16 août 2000. Il s'agit du reliquat des quelques 700 abeilles nées entre le 15 mai et le 6 juin, à partir du couvain originel. A ce moment, ces abeilles sont donc âgées de 71 à 93 jours, ce qui correspond à 1,6 à 2,1 fois la durée de vie qu'on attribue aux abeilles d'été.
Le cadre de hausse n'a jamais été bâti et le miel des réserves a été totalement consommé à raison d'une moyenne de 0,67 cellules par jour pour un peu moins d'un millier d'abeilles en moyenne.
Le 16 août, introduction à midi d'une reine fécondée de l'année, le Beeboost ayant été retiré 5 jours plus tôt. Méthode de la cage avec bouchon de candi. La reine est libérée à 17 heures et admise sans problème.
Le lendemain en fin de matinée, c'est spectaculaire ; on observe une activité presque normale avec sortie et dépôt de nectar, abeilles ventileuses ou plongées dans les cellules (ce qui n'avait jamais été observé durant le "règne du Beeboost".
Premières pontes observées le 17 août en fin d'après-midi. Le 29 août, on mesure 54 cm_ de couvain sur une face et 50 cm2 sur l'autre. Comme il n'y a pratiquement pas de pollen, on a essayé sans succès de faire prendre de la levure de bière tamisée très fin, mélangée à du sucre glace. Le 2 septembre, apparition d'opercules troués au milieu, sans affairement et le 5 on observe des abeilles qui sortent des nymphes gris clair. Le 12 septembre, on commence une série de 4 nourrissements, à une semaine d'intervalle, avec 0,5 g de Terramycine à 5 % dans 100 g de sirop de sucre (1/1).
Le nombre d'abeilles ayant chuté en dessous de 500, on introduit environ 600 abeilles, en deux fois, prélevées dans des ruches actives et laissées 36 heures dans le noir avec du candi, avant les introductions qui ne posent pas de problèmes. Le 20 septembre, il commence enfin à pleuvoir assez régulièrement et le 24 on observe les premières rentrées de pollen : 1 % des entrées totales pendant les premiers jours, puis rapidement jusqu'à 25 % à midi. Le 11 octobre, il y a 80 cellules de pollen accumulées sur les deux faces du cadre de corps. La reine, restée assez apathique depuis la fin août, se remet à pondre et le premier couvain operculé apparaît le 18 octobre.
Le cycle normal est rétabli et le 17 novembre, on compte 2000 abeilles et 300 cm2 de couvain
plat et remarquablement dense sur chaque face. Il est intéressant de noter que les réserves restent relativement faibles (en particulier la hausse n'est toujours pas bâtie), mais que le pollen (romarin, eucalyptus) continue à affluer. La cadence de ponte de la reine et l'état du couvain sont satisfaisants et montrent l'importance de l'approvisionnement en pollen.
A partir de fin novembre, les naissances ont lieu régulièrement, mais la reine ralentit sa ponte et la surface du couvain diminue. Bien qu'il y ait toujours quelques rentrées de pollen, le nombre de cellules stockées diminue très vite. Par contre, dans cette même période, les cellules de nectar augmentent dans le corps et les premiers opercules de miel apparaissent le 1er décembre, pour atteindre 87 cm2 sur une face le 9 décembre et 137 cm2 sur la même face le 17 décembre. Le cadre de hausse reste toujours étrangement intouchéé.
Profitant de la disparition du couvain fermé, on a réalisé un traitement anti varroa le 15 décembre sans constater de chute. On notera qu'un traitement similaire avait donné 50 varroas au cours d'une application en 1999. Après le 20 décembre, la température chute spectaculairement après s'être maintenue à un niveau anormalement haut et on constate une cessation nette d'activité des abeilles. L'arrêt de la ponte de la reine début décembre n'avait pas pu être relié à un changement notable des conditions météorologiques, mais l'arrêt de l'activité des abeilles semble bien dû à la baisse de température.
Le 3 février 2001, le nombre d'abeilles est descendu en dessous de 900 ; aussi on réalise une addition de quelques 200 abeilles avec la même méthode que précédemment. Quelques heures après l'introduction réussie sans hostilité, on observe un emballement de la reine par un groupe d'abeilles de 6,5 cm de diamètre. Comme toutes les abeilles sont de même origine, on ne peut pas savoir s'il s'agit des nouvelles venues. Un emballement similaire avait donné lieu en 1999 à l'élimination d'une reine, mais là, au bout de 7 heures, l'emballement s'est dissout et la reine a recommencé son activité coutumière.
A la suite d'un réchauffement de température le 10 février, la reine recommence à pondre en respectant des circuits concentriques que l'on n'avait pas observés si nettement, au cours des périodes précédentes de ponte. Le 22 février, on mesure 250 cm_ de très beau couvain fermé sur chaque face.
Entre le 7 février et le 7 mars 2001, on a enregistré les rentrées de pollen par rapport aux rentrées totales en notant en outre, l'heure, la température, le vent et la nébulosité. Chaque jour, le dépôt maximum a bien lieu entre 12 h et 14 h. Il existe une grossière corrélation statistique entre le pourcentage de pollen moyen et la température de l'air, avec une corrélation acceptable de 31 % (% pollen = 6 x degrés de température - 84). En outre, le pourcentage de pollen est en moyenne le double par vent d'est que par vent d'ouest, pour des températures voisines de l'ordre de 17,5°.
Avril est là maintenant et on attend la fièvre de l'essaimage, mais pour le moment tout est encore bien calme, car les températures ne se décident pas à augmenter.
Conséquences de l'essaimage sur la production de miel
En 2000, le nombre d'essaims n'a été que 13 % du nombre obtenu en 1999 pour un même nombre de ruches (11).
Le tableau ci-dessous donne quelques résultats de production pour ces deux années, sous forme de moyennes (avec la variabilité statistique) et de valeurs maximales (hausses Dadant 9 cadres).
L'importance de l'essaimage apparaît clairement pour la production totale alors que les mesures unitaires sont très constantes. Comme on pouvait s'y attendre, la production par ruche est homogène quand il y a eu peu d'essaims (variabilité normale de 0,27) alors qu'il y a une grande dispersion encore d'essaimage (0,60).
Au cours des mêmes mesures, on a pesé les hausses Dadant 9 cadres. Le poids maximal est de 21,943 kg. Je le considère comme le maximum que l'on peut raisonnablement manipuler seul, en particulier quand c'est la troisième hausse.
B. Schneider