Les effets du chauffage sur le HMF et l'invertase des miels
Sophia KARABOURNIOTI et P. ZERVALAKI
Laboratory of Quality Control, Bee Culturing Company Attiki
Arcadias 18, Peristeri l2131, Athènes, Grèce
Tél.: 0105711721, 0105751896; fax: 0105717113
E-mail: Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
Apiacta, 2001, 36 (4), 178 - 181
Résumé
Cinq échantillons de miels d'origine botanique différente ont été soumis pendant 24 heures à la température de 35o, 45o, 55o, 65o ou 75oC. La baisse du taux d'invertase et la hausse du taux de HMF ont été déterminées par des méthodes harmonisées. On discute de la possibilité d'utiliser l'invertase et le HMF comme indicateurs du niveau de chauffage subi par les miels. Le HMF peut être utilisé pour le dépistage des miels surchauffés, alors que l'invertase peut servir d'indicateur du chauffage moyen.
Mots-clefs
miel/invertase/HMF/chauffage
Introduction
En vue de sa mise sur le marché, le miel doit être soumis à différents traitements, dont l'exposition à la chaleur. L'activité de la diastase et le taux d'hydroxyméthylfurfural (HMF) sont considérés comme les principaux paramètres permettant d'évaluer la fraîcheur des miels et d'avoir des informations sur les traitements thermiques subis et les conditions de conservation. De nombreux auteurs ont exprimé des opinions différentes sur l'utilité de ces paramètres. WHITE (1992, 1994) a critiqué sévèrement, dans une série d'articles, l'emploi de la teneur en diastase comme critère de qualité dans l'évaluation de miels. Selon lui, la teneur en diastase n'est pas un indicateur fiable de la qualité des miels, alors que le taux de HMF convient mieux à ce but et peut "fournir toutes les informations nécessaires concernant l'exposition à la chaleur de n'importe quel miel". Dans une étude antérieure, WHITE (1964) démontrait que l'invertase est préférable à la diastase car plus sensible au chauffage. DUSTMANN (1993) a affirmé que "l'invertase, en association avec d'autres critères analytiques, permet de dépister les dommages provoqués par le surchauffage ou le stockage de longue durée" et encore que "le HMF ne convient nullement à la mise en évidence des dommages dus à la chaleur s'il est pris comme critère unique d'évaluation". L'invertase est l'enzyme responsable de la conversion du saccharose en fructose et en glucose. Elle est sécrétée par les glandes nourricières des ouvrières qui l'ajoutent au nectar amené dans la ruche (WHITE, 1975) et elle assure la transformation du nectar en miel au cours du processus de maturation. La quantité d'enzyme sécrété dépend de l'âge de l'abeille (BROUWERS, 1982, 1983), de l'état et de la force de la colonie (HUANG et coll., 1989), du flux de nectar, des conditions météorologiques (WHITE, 1975) et des méthodes de conduite des colonies (LAUDE et coll., 1991).
WHITE et coll. (1964) ont étudié les effets de la conservation et des traitements thermiques sur l'invertase, la diastase et le HMF. TAKENAKA et ECHIGO (1974) ont étudié le processus de baisse de l'invertase et de la diastase durant le stockage des miels et DUSTMANN et coll. (1985) ont déterminé la précision des méthodes basées sur l'invertase. La teneur en invertase a été déterminée par BOGDANOV et coll. (1987) sur des miels suisses et d'autres pays, ALDCORN et coll. (1985) sur des miels canadiens, LAUDE et coll (1991) sur des miels des Philippines, HUIDOBRO et coll. (1995) sur des miels espagnols, KARABOURNIOTI et DRIMJIAS (1997) et TSIGOURI et PASSALOGLOU (2000) sur des miels grecs et PERSANO ODDO et coll. (1996, 1999) sur des miels italiens.
Le but de la présente étude a été de suivre l'évolution du processus de diminution de l'activité de l'invertase et de hausse du HMF au cours du chauffage à des températures différentes et d'étudier les associations possibles entre ces paramètres en vue de les utiliser comme indicateurs d'un éventuel surchauffage. La sélection d'échantillons d'origine botanique diverse et à valeur initiale différente de ces paramètres a eu justement pour objectif de déterminer les effets de la chaleur sur des miels divers et d'évaluer la résistance de ce produit de la ruche au traitement thermique.
Matériel et méthodes
Cinq échantillons de miels d'origine botanique différente, à savoir: pin, thym, cotonnier, tournesol et oranger, ont été divisés en six portions de 500 g chaque. L'origine botanique a été déterminée par analyse sensorielle, à l'aide de la conductibilité électrique et de l'analyse pollinique réalisée par la méthode de Louveaux et coll. (1978). L'une des six portions obtenues pour chacun des miels n'a pas été chauffée, mais les cinq autres ont été placées en bain-marie pour 24 heures à la température de 35o, 45o, 55o, 65o ou 75oC. Tous les miels provenaient de la récolte 2001, à l'exception de celui de tournesol récolté en 2000 et ayant donc été conservé pendant un an, ce qui explique la forte teneur en HMF de la fraction non chauffée. Pour tous les miels récoltés en 2001, l'intervalle écoulé entre l'extraction et le traitement a varié de dix jours à trois mois, temps pendant lequel ils ont été conservés à la température de la chambre. Les miels ont été examinés tout de suite après le chauffage pour leur teneur en HMF et en invertase.
L'activité de l'invertase a été déterminée par la méthode de SIEGENTHA-LER (1977), basée sur la mesure par spectrophotométrie de la décomposition du p-nitrophényl-alpha-D-glucopyrinoside (p-NPG) en p-nitrophénol, à 400 nm. Les résultats sont exprimés en unités d'enzyme par kilogramme (U/kg). Le HMF a été mesuré par la méthode de WHITE (1979), basée sur l'absorption en UV du HMF à 284 nm. Les résultats sont exprimés en milligrammes par kilogramme (mg/kg). L'analyse a été effectuée à l'aide d'un spectrophotomètre en UV à double rayon Hitachi U-2001.
Résultats
Sur le tableau I nous donnons les valeurs obtenues pour le HMF et l'invertase pour les cinq miels soumis à des températures différentes. Comme nous nous y attendions, le HMF a augmenté et l'invertase a baissé à la suite du traitement thermique. Nous avons constaté que la résistance à la chaleur varie en fonction de l'origine botanique du miel considéré. Le miel de pin s'est avéré le plus résistant à la chaleur, tout comme celui d'oranger, suivis par les miels de thym, de cotonnier et de tournesol.
Type de miel |
Pin |
Oranger |
Cotonnier |
Thym |
Tournesol |
|||||
Temp. (en oC) |
HMF (en mg/kg) |
Invertase (en U/kg) |
HMF (en mg/kg) |
Invertase (en U/kg) |
HMF (en mg/kg) |
Invertase (en U/kg) |
HMF (en mg/kg) |
Invertase (en U/kg) |
HMF (en mg/kg) |
Invertase (en U/kg) |
Non chauffé |
1,20 |
200,30 |
2,25 |
23,85 |
26,80 |
93,00 |
9,70 |
104,10 |
8,78 |
70,64 |
35 |
1,95 |
179,30 |
3,45 |
18,90 |
29,20 |
90,10 |
9,90 |
96,50 |
10,78 |
65,64 |
45 |
2,25 |
174,50 |
3,75 |
12,70 |
32,60 |
72,50 |
11,40 |
74,20 |
13,17 |
53,56 |
55 |
4,80 |
121,30 |
4,35 |
10,80 |
39,00 |
28,90 |
16,50 |
32,40 |
23,95 |
20,66 |
65 |
12,40 |
10,65 |
19,00 |
3,50 |
87,60 |
2,55 |
52,70 |
4,0 |
48,20 |
6,35 |
75 |
43,40 |
4,90 |
63,30 |
0 |
226,35 |
0 |
173,4 |
0 |
191,35 |
1,11 |
Bibliographie
[1] Aldcorn, D L; Wandler, E; Sporns, P (1985) Diastase(a and ß-amylase) and a-glucosidase(sucrase) activity in western Canadian honeys. Canadian Institute of Food Science and Technology Journal 18(3): 268-270.
[2] Bogdanov, S; Rieder, K; Ruegg, M (1987) Neue Qualitastkriterien bei Honigntersuchungen. Apidologie 18(3): 267-278.
[3] Brouers EVM (1982)Measurement of hypopharygeal gland activity in the honeybee Journal of Apicultural Research 21(4): 193-198.
[4] Brouers EVM (1983)Activation of hypopharygeal glandsof honeybees in winter Journal of Apicultural Research 22(3): 137-141.
[5] Dustmann, JH; Praagh, JP; Bote, K (1985) Zur bestimmung von diastase, invertase und HMF in honig. Apidologie 16(1): 19-30.
[6] Dustmann JH(1993) Honey quality and its control. American Bee Journal 133(9): 648-651.
[7] Huang,ZY; Otis, GW; Teal,PEA (1989) Nature of broad signal activity the protein synthesis of hypopharygeal gland in honeybee Apis mellifera(Apidae:Hymenoptera) Apidologie 20, 455-464.
[8] Huidobro, JF; Santana, FJ; Sanchez, MP; Sancho, MT; Muniategui, S; Simal-Lozano J(1995) Diastase, invertase and ß-glucosidase activities in fresh honey from north-west Spain. Journal of Apicultural Research 34(1): 39-44.
[9] Karabournioti S; Drimjias N (1997) Some physicochemical characteristics of Greek monofloral honeys Apiacta XXXII 44-50.
[10] Laude, VT; Naegel, L; Horn, H (1991) Die physiko-chemischem Eigenschaften Philippinischer Honige Apidologie 22, 371-380.
[11] Louveaux, J; Maurizio, A; Vorwohl, G (1978) Methods of melissopalynology. Bee World 59(4): 139-157.
[12] Siegenthaler U (1977) Eine einfache und rasche Methode zur Bestimmung der a-Glucosidase(Sacharase) in Honig. Mitt Geb Lebensmittelunters Hyg 68, 251-258.
[13] Takenaka, T; Echigo, T (1974) Changes in enzyme activity during the storage of honey. Bulletin of the Faculty of Agriculture, Tamagawa University no 14: 19-25.
[14] Tsigouri A, Passaloglou M (2000) A scientific note on the charactreristics of thyme honey from the Greek island of Kithira. Apidologie 31, 457-458.
[15] Persano Oddo, L; Pulcini, P; Piazza, MG ((1996) Invertase content of Italian unifloral honeys. Apicoltore Moderno 87 (1) 25-29.
[16] Persano Oddo, L; Piazza, MG; Pulcini, P((1999) Invertase activity in honey. Apidologie 30: 57-65.
[17] White, J; Kushnir, I; Subers M H (1964) Effect of storage and processing Temperatures on honey quality. Food Technology 18(4): 153-156.
[18] White, JW (1975) Composition of honey, in Crane E. (Ed), Honey: A Comprehensive Survvey, Heinemann, London pp. 180-194.
[19] White, JW(1979) Spectrophotometric method for hydroxymethylfurfural in honey. J Assoc Off Anal Chem 62, 509.
[20] White, JW (1992)Quality evaluation of honey: Role of HMF and diastase assays in honey quality evaluation. American Bee Journal 132(11/12): 737-742, 792-794.
[21] White, JW (1994) The role of HMF and diastase assays in honey quality evaluation. Bee World 75(3): 104-117.